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"Écouter avec les oreilles du cœur"

  • 1 septembre 2022
Message du pape François pour la 56è Journée Mondiale des Communications Sociales

Il n’y a pas longtemps, je suis allé visiter la résidence pour les missionnaires âgés et malades que les Comboniens ont dans la ville de Guadalajara, au Mexique. Là, j’ai rencontré le confrère Carlos Cárdenas, un Frère Combonien qui a subi un grave accident alors qu’il travaillait dans la mission au Pérou. Il s’est brisé la colonne vertébrale et est devenu paralysé. Aujourd’hui, il est alité et doit se déplacer en fauteuil roulant. Je lui ai demandé comment il peut continuer à se sentir missionnaire dans cette situation, et il m’a répondu qu’il parle beaucoup avec les gens, surtout, qu’il écoute beaucoup ceux qui viennent lui rendre visite, en particulier les agents de santé qui s’occupent de lui. «Lorsque je les écoute et que je leur donne l’occasion de parler, ils me racontent leur vie et disent qu’ils apprennent beaucoup de moi», m’a-t-il dit. L’écoute est devenue, pour lui, un style de vie et une autre façon d’être missionnaire.
Le message du pape François pourla 56ème Journée Mondiale des Communications sociales, à célébrer le 29 mai, est intitulé «Écouter avec les oreilles du cœur». Le Pape insiste sur l’importance de savoir écouter pour le bien de nos relations sociales. «Ecouter, nous dit François, est un verbe décisif dans la grammaire de la communication et une condition du dialogue authentique, car l’écoute reste essentielle pour la communication humaine».

Les oreilles du cœur
Le Pape commence son message avec plusieurs allusions à la Bible, dans lesquelles on voit que l’écoute va au-delà de la simple perception acoustique et se réfère toujours au dialogue et à la relation de Dieu avec les êtres humains. Dans l’Exode, Dieu «écoute» le cri de son peuple qui souffre de l’esclavage en Égypte et prend la décision de le libérer. Dans le livre du Deutéronome (Dt 6,4), nous lisons ce qui est considéré comme la profession de foi du peuple juif : «Écoute Israël (shema’ Israël)» ; et Saint Paul affirme dans sa lettre aux Romains que «la foi vient de l’écoute» (Rm 10,17). Par ces textes, François veut montrer que Dieu est un Dieu à l’écoute de l’homme et que l’homme doit ouvrir son cœur pour l’écouter.
«Ainsi, affirme le Pape, il y a, d’une part Dieu, qui se révèle toujours en se communiquant librement et, d’autre part, l’homme, à qui il est demandé d’écouter».
Cette écoute, que ce soit des paroles qui viennent de Dieu ou celles qui viennent des autres, doit se faire avec les oreilles du cœur, c’est-à-dire mettre toute notre personne dans cette attitude d’accueil de la communication qui nous vient de l’autre. «Souvent, poursuit le Pontife, même ceux qui ont une ouïe parfaite ne savent pas écouter les autres; il y a une surdité intérieure qui est pire que la surdité physique, parce que l’écoute n’est pas seulement une question de sens de l’ouïe, mais de toute la personne». Et en ce sens, il cite Saint Augustin, qui nous invite à ne pas avoir le cœur dans les oreilles, mais les oreilles dans le cœur.





Condition d’une bonne communication
Pour le Pape, l’écoute qui favorise la communication humaine est celle qui se fait face à face, ouvertement et sincèrement, en s’approchant de l’autre de manière loyale, sincère et honnête; et non celle qui se fait «en cachette, en espionnant, en instrumentalisant les autres pour nos propres intérêts». Ce dernier type d’écoute est malheureusement très présent dans notre vie moderne, notamment à travers ce que les réseaux sociaux, où l’on ressent un certain plaisir à regarder et à écouter «en cachette» la vie des autres, mais sans s’y impliquer et sans rechercher une relation personnelle, fraternelle et sincère. Dans la vie publique aussi, nous souffrons de ce manque d’écoute. Au lieu d’écouter les autres, nous aimons nous écouter nous-mêmes, en essayant de convaincre nos interlocuteurs de nos points de vue sans tenir compte des leurs. Combien de prétendus «dialogues» ont échoué dans la vie politique, sociale ou économique pour cette raison! «Dans la vraie communication, dit le Pape, toi et moi nous nous tendons la main; l’écoute est le premier et indispensable ingrédient du dialogue et de la bonne communication».

A l’attention des journalistes
Dans son message, le pape François s’adresse aussi aux journalistes et aux professionnels de la communication, les invitant à écouter, à consulter différentes sources et à «être prêts à changer d’avis, à modifier leurs hypothèses initiales». En effet, l’un des grands défauts de ceux d’entre nous qui travaillent dans la communication est que nous partons de nos propres principes, de notre idéologie, de nos croyances religieuses ou de notre façon de voir les choses, et à partir de là, nous interprétons les événements et les communiquons à notre public, en essayant de le convaincre que ce que nous lui disons est la vérité. Et souvent, même sans le savoir, nous contribuons à la désinformation précisément parce que nous n’avons pas eu l’attitude d’écoute profonde dont parle François dans son message. Un bon professionnel de la communication doit toujours avoir l’humilité et le savoir-faire pour écouter tous les impliqués et reconnaître qu’il n’a pas toujours la vérité.



Une journaliste faiit une interview à un jeune


L’écoute dans l’église
Pour le Pape, le don le plus précieux que nous pouvons nous offrir dans l’Église est celui de nous écouter les uns les autres. En novembre dernier, j’ai eu l’occasion de participer à un événement ecclésial au cours duquel cette écoute à laquelle le Pape fait référence s’est manifestée de manière belle et enrichissante. C’était lors de l’Assemblée Ecclésiale de l’Amérique Latine et des Caraïbes, qui s’est tenue au Mexique et qui a été précédée de ce que l’on a appelé la «phase d’écoute», au cours de laquelle des prêtres, des religieux et religieuses et des laïcs, tant dans la sphère ecclésiale que dans la société civile, ont eu l’occasion d’exprimer leurs sentiments, leurs attentes, leurs désirs et leurs espoirs pour une nouvelle manière d’être Église. Pendant tout le processus de l’Assemblée, le mot «écoute» a été le plus prononcé et le plus pratiqué. A la fin, tous les participants ont manifesté leur joie et leur satisfaction parce qu’ils avaient vécu une expérience fraternelle de discernement communautaire dans laquelle tous se sont sentis accueillis et écoutés.

Un synode d’écoute mutuelle
Le Synode sur la Synodalité, prévu pour octobre de l’année prochaine et déjà en préparation, est un évènement qui manifeste le désir du Pape que l’Église s’engage avec plus de fermeté et de conviction sur la voie de l’écoute mutuelle. «La communion n’est pas le résultat des stratégies et de programmes, dit le Pape à la fin de son message, la communion se construit sur l’écoute mutuelle entre frères et sœurs. Comme dans un chœur, l’unité ne requiert pas l’uniformité ou la monotonie, mais la pluralité et la variété des voix. Conscients de participer à une communion qui nous précède et nous inclut, nous pouvons redécouvrir une Église symphonique, dans laquelle chacun peut chanter avec sa propre voix, en accueillant les voix des autres comme un don, pour manifester l’harmonie du "Tout" que l’Esprit Saint compose».
 

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