Nouvelles

L’érosion menace de tout emporter

  • 14 mai 2025
P. Ben Expedit Kumongo
 
Nous sommes dans la commune de Kimbanseke, au quartier Sakombi, connu sous le nom de Mokali, à Kinshasa, la capitale de la République Démocratique du Congo. Tristes et impuissants d’assister à la dégradation de l’environnement, nous exposons ici les larmes d’une mère victime du ravin causé par l’érosion. Une érosion qui pousse et avance vite. Chaque année cette érosion avale plus de cinq parcelles, elle se dirige vers la grande route pour couper notre quartier en deux, isoler la paroisse et empêcher l’accès aux véhicules et nous enclaver d’avantage. C’est la souffrance que nous partageons à travers les larmes d’une femme.

Je suis là, assise sur le seuil de ma pauvre maison, les mains jointes, le regard perdu. Devant moi, il est là : ce ravin, ce monstre silencieux qui avance, qui consomme chaque fois qu’il pleut. Il approche, il s'étend, il s'ouvre comme une grande bouche noire prête à tout avaler. Et moi, je regarde, impuissante, le cœur écrasé par la peur, la douleur et le désespoir.
Ma maison, s’en va! Pourtant, c’est tout ce que j’ai. C’est là que j’ai élevé mes enfants, que j’ai rêvé passé ma vieillesse. Chaque brique a été arrachée au prix des années de privations et sacrifices. Ce n’est pas une grande maison, mais c’est ma villa, un palais rempli d’amour, de souvenirs et de vie.


 




Et aujourd'hui, ce ravin menace de tout emporter. Déjà, la clôture s'est écroulée, emportée par les eaux de pluies. Déjà, un coin du jardin où je plantais quelques légumes a disparu. Bientôt, ce sera le tour de la cuisine, puis de la chambre où dorment mes petits. Bientôt, ce sera tout.
Je crie, mais qui m'entend? Je supplie, mais qui me tend la main? Les autorités parlent de projets, de budgets, de promesses … mais moi, je n’ai que mes larmes pour pleurer, et mes bras pour tenter de sauver ce qui peut l’être avec des sacs et morceaux de bambous.





La nuit, pas de sommeil.  Chaque coup de tonnerre m’arrache la paix, l’appétit et me fait sursauter. Chaque pluie est une catastrophe. Et je prie. Et je crie. Et je pleure. Sans secours, je désespère. Je regarde mes enfants, sans avenir ni héritage. Est-ce il y a quelqu’un quelque part qui entende mon cri de détresse? Est-ce qu’il y a quelqu’un qui puisse intervenir avant que cela touche mon église ? Je suis fatiguée. Fatiguée de crier! Fatiguée, fatiguée de remplir les sacs de sables. Fatiguée, fatiguée de planter les bambous! Fatiguée, fatiguée de voir mes enfants grandir dans l’ombre d’une catastrophe plus forte qu’eux. Fatiguée!
 

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